Inauguration...
La commune de Concressault a inauguré, dimanche, le monument aux enfants de la commune morts pour la Patrie.
La population qui ne se compos que de 550 habitants, a rendu un digne hommage aux victimes qui, au nombre de 28, ont versé leur sang pour le salut de la France . Elle a généreusement donné, et une somme de cinq mille francs a pu être réunie, en vue de l’érection du monument qui perpétuera désormais la mémoire de nos héros.
Ce monument a été érigé dans le cimetière. Il se compose d’un socle, surmonté d’une colonne conique. Celle-ci est ornée d’une gerbe de lauriers ; sur les parties planes du socle, sont gravés les noms des glorieux morts. Autour du monument sont groupées les tombes des enfants de la commune ramenés du front ; ces tombes disparaissent sous les fleurs.
Toute la population de Concressault et des environs a pris part à la cérémonie de l’inauguration, qui fut imposante. La musique d’Aubigny prêtait son gracieux concours, ainsi que les pompiers de la commune.
La solennité a commencé par une grande messe au cours de laquelle le curé de la paroisse a prononcé une éloquente et touchante allocution.
A midi, un banquet a été servi à l’hôtel tenu par M Manoury. Etaient présents ; M. Dissardn sous préfet de Sancerre ; M. Mauger, sénateur ; M. Marcel Plaisant, député ; M. Raimbault, maire, M le commandant Allary, représentant le général ; M. Rat, conseiller d’arrondissement, des maires, ect…
Autour de la table se trouvaient réunis plus de soixante convives.
Au dessert, un toast a été porté par M. le maire. Il a aimablement remercié les personnalités qui avaient bien voulu répondre à l’invitation de la commune de Concressault, en particulier les représentant du Cher au parlement, le délégué au général en Chef tous les élus ; conseillers généraux, maires, à tous, il a souhaité une cordiale bienvenue et dit combien il était touché pour l’hommage qui était ainsi rendu aux enfants de la commune tombés au champ d’honneur.
Successicement, MM. Mauger, sénateur et Marcel Plaisant, député, ont remercié.
Ces toasts ont été très applaudis.
Vers trois heures, un cortège, précédé de la musique d’Aubigny, escorté des pompiers de Concressault, s’est formé pour se rendre au cimetière.
La musique exécute une marche funèbre puis la cérémonie a commencé par l’appel des 28 soldats de Concressault, dont les noms figurent sur le monument et rappellent le sacrifice. C’est le lieutenant des pompiers qui évoque leurs noms, tandis qu’un caporal répond : « Mort pour la France ! »
Prenant le premier la parole, M. Raimbault, maire, exprima en ces termes :
« Mesdames Messieurs,
La petite commune de Concressault peut être fier d’avoir pu élever par ses propres ressources un monument à ses enfants bien aimés. Du fond de mon cœur le sui dis merci.
Notre pays a payé un lourd tribut à la guerre. La liste des morts est longue, et nombreuses sont les familles en deuil, mais malgré les chagrins insondables tous donnèrent à pleines mains pour perpétuer le souvenir et honorer la mémoire de ceux qui ont consenti le sacrifice de leur vie.
Cette pierre majestueuse et simple nous rappellera toujours les heures sombres que nous avons vécues, le calvaire interminable de nos combattants et de leurs proches ; elle nous parlera des années de l’invasion, des angoisses concernant le sort des départements envahis. Concernant aussi l’avenir de notre pays, pour lequel nous avons tous un amour profond, un amour qui dédaigne souvent les paroles, mais que nos braves soldats ont exprimé en actes.
Que les familles de ces braves reçoivent ici les condoléances et l’expression de la sympathie de tous le pays. Et que dans leur douleur incommensurable, elles aient au moins la satisfaction légitime de voir aujourd’hui les aînés de ces martyrs honorer pieusement leur mémoire.
Aux parents et aux épouses privés de venir prier sur une tombe, cette pierre sur laquelle est inscrit le nom ce celui qui n’est plus, sera, dans la paix du cimetière, le monument funéraire qu’ils pourront fleurir et om ils pourront se recueillir.
Chers enfants si, au fond de vos tombeaux vous pouviez apercevoir la foule frémissante qui vous aime et vous pleure, l’éternité vous paraîtrait plus sereine et plus douce. Dans un adieu suprême je vous dis dormez en paix enfants chéris, et que la terre vous soit légère. »
M le commandant Allary, délégué du général commandant le 8ème corps d’armée, a pris ensuite la parole. Voici la partie principale de son discours.
« Mesdames, messieurs.
Victoire, victoire ! C’est à vous surtout que nous la devons ; votre pieux souvenir ne doit pas s’altérer, doit, au contraire, grandir par l’histoire. Dans tous les coins de France, des monuments sont élevés pour perpétuer à jamais vos sacrifices sublimes ; vos noms sont inscrits sur la pierre. Mort au champ d’honneur, vous faites la fierté de votre clocher natal. Votre exemple est et sera cité constamment à vos frères, vos enfants et vos générations futures, qui viennent ou viendront accomplir sous le drapeau tricolore le devoir sacré pour conserver à la France sa force et son inviolabilité.
Que votre sacrifice, que votre gloire immortelle adoucisse les deuils si cruels, si nombreux que vos disparitions ont semés !
Debout les morts ! Appel suprême adressé aux berrichons dans la tranchées, au corps à corps avec l’ennemi féroce sans merci. Vous vous êtes levé, et le rempart de vos âmes a arrêté ; a fait reculer l’adversaire.
Aujourd’hui, dormez en paix du sommeil du radieux justicier, des glorieux martyrs pour lesquels montera toujours la prière d’extase de la Patrie reconnaissante. Nous vous saluons de toute notre ardente et pieuse admiration, de toute notre âme. Nous couronnons de lauriers vos monuments de pierre devant lesquels on ne doit pas passer sans s’incliner avec le plus profond respect.
Vive la France !
M. Dissard, sous préfet de Sancerre a pris à son tour la parole.
Il a remercié, au nom du gouvernement, le maire et les habitants de la commune de Concressault de l’élan remarquable, de l’union fraternelle dont ils ont fait preuve pour ériger un si beau monument et couvrir de fleurs les tombes des morts de la Grande Guerre. Il a assuré les familles des victimes que le gouvernement ne les oubliera pas. Veuves, orphelins, doivent compter sur son entière sollicitude. Les morts de la grande guerre peuvent dormir en paix, ceux qu’ils ont laissés trouveront aide et protection dans la grande famille républicaine.
M. Plaisant, député, a prononcé un vibrant discours, où il a célébré l’héroïsme des enfants de la commune de Croncressault, morts pour la Patrie.
M. Mauger, sénateur, dans une allocution paternelle s’est adressé plus spécialement à la jeune génération, l’invitant à ne pas oublier les leçons de la dernière guerre et à s’inspirer de l’exemple de ses aînés.
Le défilé devant le monument et les tombes fleuries a été très impressionnant.
Source: La semaine berrichonne du 7 octobre 1922 - Transcription Monumentsducher1418