Inauguration...
Dimanche dernier, à 11 heures, a été célébrée devant une nombreuse assistance, l’inauguration du monument élevé à la mémoire des enfants de Saulzais MORTS POUR LA France au cours de la grande guerre.
Cette cérémonie fut très émouvante dans sa simplicité. Le cortège se forma devant la gendarmerie, M. Pajot, conseiller général du canton en tête. Il se dirigea, aux accents de la marseillaise, jusqu’au pied du monument devant lequel une estrade ornée de verdure était dressée. M. Duffault, maire de Saulzais, prononça un vibrant discours rendu plus impressionnant encore par l’appel des quarante neuf morts dont les noms figurent sur les plaques du monument. Après lui, M. Pajot prit la parole en ces termes :
Mesdames, messieurs,
Invité par la municipalité de Saulzais le Potier à l’inauguration du monument qui est devant nous et qui est destiné a perpétuer la mémoire des enfants de la commune mort pour la France, je me suis fait un devoir d’y assister.
Il y a quelques temps nous fêtions ceux qui sont revenus de la Grande et horrible guerre qui nous a été imposée. Hélas : revenus ? Mais ayant perdu toutes ou partie de leur facultés. Nous leur donnions, à ces braves, l’assurance que l’Etat devait et doit, s’il ne l’a fait, pourvoir à tous leurs besoins, et nous sommes heureux de répéter aujourd’hui à ceux qui sont présents qu’ils ont droit à toute notre sollicitude, et qu’ils peuvent compter que nous nous efforcerons, par tous les moyens, en notre pouvoir, d’adoucir les souffrance physiques ou morales, parfois bien cruelles, qu’ils sont obligés de supporter.
En ce jour nous fêtons ceux qui ne sont pas revenus, que leurs chères familles croyaient revoir et qu’elles ont attendus en vain.
Si nos populations des départements de l’Est et du Nord ont tout perdu, victimes de l’invasion des sales boches qui n’ont pas craint, en employant les moyens dévolus à la seule barbarie ; le fer, le feu, l’inondation, le poison, de mettre tout à sac et à sang ; de fusiller aussi les citoyens les plus honnêtes sur un simple soupçon, nos populations du centre n’en ont pas moins été cruellement éprouvées par la perte des êtres qui leur étaient les plus chers ; qui ? un père chéri ! qui ? un époux bien aimé ! qui ? un frère adoré ! qui ? l’ami le plus sincère !
Nous comptons à peu un mort pour 25 habitants. La commune de Saulzais pleure 49 de ses enfants, pères de familles ou célibataires. Ces braves, dès le premier jour de cette guerre maudite, qui a duré plus de quatre années, avaient fait le sacrifice de leur vie pour la défense de leurs foyers et de la France.
De 18 à 45 ans ils étaient partis couverts de fleurs et en chantant tous nos chants patriotiques si entraînants ; notre sublime Marseillaise, notre chant du départ, le chant des Girondins, et l’on aurait dit que cet hymne ; Mourir pout la Patrie, c’est le sort le plus beau digne d’envie, répondait bien à leur pensée.
Dans tous les cas tous les bons Français, tous les bons citoyens, préféreraient la mort à la honte et à l’esclavage.
Ils sont morts ces braves mais proclamons le bien haut :
Ils ont sauvé la France et la liberté du monde entier.
Ils nous ont rendu l’Alsace et la Lorraine, que ces infâmes boches nous avaient ravis en 1870.
Ils ont sauvé la république qui a donné la victoire, et que personne ne conteste plus comme étant le seul régime indispensable à la Liberté, et à tous les progrès, et dont les destinées sont celles de la France elle-même.
Ce sont tous des héros comme jamais l’histoire n’en a connu et que nous devons tous unir : chefs et soldats, dans la même gloire. Autrefois c’était le privilège des seuls chefs, et même des grands chefs, de voir perpétuer leur mémoire. Aujourd’hui trêves de privilèges, soldats et chefs ne font plus qu’un pour la postérité. Ils sont confondus.
Ils ne sont plus nos chers morts, nos braves des braves ; mais pour notre génération et pour celles qui nous suivront leur mémoire, leur souvenir, sinon aux même, vont revivre dans la Gloire et l’immortalité.
Ce monument et une infinité d’autres, ainsi que des plaques portant leurs noms placées dans les mairies et les écoles, perpétueront à jamais leur souvenir.
Gloire immortelle à nos chers morts !! et vive la France et la république !!!
La section de Saulzais de la société « aide et protection » remit ensuite une superbe palme au pied du monument. Pour clore la cérémonie, la Marseillaise vint de nouveau rendre les honneurs à nos chers disparus.
A midi, un banquet public fut servi à l’hôtel Petitjean, M. Pajot conseiller Général, M. Bourdier, conseiller d’arrondissement, ainsi que la plupart des membres de la municipalité y assistaient.
Tous nos compliments aux organisateurs de cette fête pleinement réussie.
Source: L'Avenir du Cher N1867 du 12 septembre 1920. Transcription Loïc Vasseur