Discours prononcé par Marcel Plaisant le XXV septembre MCMXXI a Brinon sur Sauldre à l’inauguration du monument aux enfants tombés pour la Patrie.
Monsieur le maire,
Messieurs,
Brinon à ses morts glorieux a élevé ce monument ; Brinon à ses morts glorieux a offert ces palmes, symbole de la victoire, signe de la reconnaissance perpétuelle de la commune à l’égard de ceux qui ont donné leur vie humaine pour la vie de la Patrie.
Si la cérémonie de ce jour, que vous avez entendu entourer du plus vif éclat, prétendait servir de récompense aux hommes qui ont succombé sur les lointains champs de bataille, elles se serait qu’un témoignage de notre vanité passagère devant l’immortalité de ces illustre, mais si cette assemblée solennelle doit célébrer les vertus de vos citoyens qui sont devenus des héros comme soldats, c’est bien aux représentants de la cité qu’il appartient de saluer, tel un décor public, l’abnégation et la grandeur morale de ces enfants qui laissent réfléchir sur l’image de la France, un rayon émanant de cette terre et de vos foyers sacrifiés.
Plutôt que de chercher la consolation de ceux qui ont tout perdu par le trépas des meilleurs, nous préférons raffermir nos cœurs au spectacle de la confiance et de l’orgueil qui doivent enrichir notre vie collective, quand l’énergie croissait à chaque coup de la fortune. Ces enfants emportés dans l’élan de la victoire ne voudraient pas de nos regrets ; ils sont morts, où pour les jeunes hommes mourir est beau.
Mais en érigeant cet obus de granit pour commémorer leur souvenir, peut-être vous a-t-il plu de rappeler par le signe de la destruction, leur mâle courage qui bravait les rafales, leur résistance impassible devant l’orage de la mitraille allemande, enfin leur âme immortelle, leur âme que sous l’avalanche de fer et de feu était une âme de fer et de feu.
Nous ne voulons pas croire que ces beaux enfants nous aient été ravis en vain, que la France victime d’une agression barbare, dévastée dans ses plus riches départements, appauvris dans son sang et dans ses biens, demeure sans secours devant un ennemi perfide et des alliés indolents. Non seulement la justice, mais encore la nécessité que révèle un budget ployant sous les charges proclamant que nous ne pouvons pas vivre dans les réparations inéluctables que nous doit le vaincu.
Il est même étrange que l’ingratitude des temps contraigne les représentants du peuple à énoncer ces vérités premières. L’Allemagne qui, pour reprendre le sombre vers d’Eschyle, « a voulu tenir le droit par devers, elle, et le confisquer sa discrétion » ose entreprendre une nouvelle et insolente offensive pour se disculper de sa responsabilité intégrale dans la guerre.
Nous voulons espérer que le gouvernement ne laissera ni affaiblir le principe de la responsabilité absolue inscrit dans le Traité de Versailles, revêtu de la signature de toutes les puissances, ni compromettre notre droit aux réparations par des atermoiements ou des transactions qui inquiètent le monde du travail et des affaires et qui retardent notre renaissance à la vie économique.
S’il veut allier l’énergie à la clairvoyance, la décision rapide au sang froid, il sera soutenu dans une politique qui nous conduise enfin à des résultats effectifs.
L’accusation d’impérialisme habilement entretenu par la propagande allemande qui trouve les fonds nécessaire à cette besogne de combat, ne résiste pas au jugement de ceux qui connaissent les traditions de la république. La république ne saurait se réaliser toute entière dans sa doctrine et dans son idéal que par la paix française propre aux œuvres fécondes et aux longs pensés
Mais la république gardienne des destinées de la patrie, fondée par le droit, ne laissera pas prescrire le droit.
Héros de Brinon sur Sauldre, si vous êtes passés dans un sanglante chevauchée, le portique de la gloire, c’est pour qu’à l’horizon se lève la France radieuse restituée dans sa chair, et fortifiée par l’action.
Source: L'Avenir du Cher N1922 du 2 octobre 1921 - Transcription Monumentsducher1418