Inauguration...
Le voyageur ou le promeneur qui suit la route nationale de La Charité traverse, à huit kilomètres de Bourges, le bourg de Saint Germain du Puy.
Il y apercevra, à l’entrée de la place de l’église et de la Mairie, le monument élevé par souscription par les habitants de la commune à leurs morts de la grande guerre.
C’est une modeste stèle, pyramide tronquée de près de trois mètres de hauteur, surmontée d’un buste de femme casquée, représentant la France. En dessous se détachent en relief dans la pierre, l’insigne de la croix de guerre, puis un faisceau de palmes et lauriers.
Sur la face méridionale du socle une plaque de marbre porte cette inscription : « A la mémoire glorieuse des enfants de Saint-Germain-du Puy Morts pour la France. 1914-1918 ». Sur les autres faces, sur des plaques de marbre également sont inscrits en lettres d’or des noms des vingt-trois enfants que la commune a sacrifiés à la Patrie.
L’inauguration de ce monument a eu lieu dimanche, en présence des habitants et de nombreuses autres personnes venues de Bourges et des environs.
Ce n’est pas sans appréhensions que les organisateurs de la cérémonie ont vu poindre le jour, car le temps était orageux et quelques gouttes de pluie étaient même tombées ; le journée allait-elle être gâtée par la pluie ? Il n’en fut rien : le ciel demeura nuageux, mais le temps fut splendide et même très chaud.
La journée s’est très bien passée et pour la circonstance l’union des coeurs fut consacrée par une bonne harmonie.
Elle débuta, le matin, par une grand’messe solennelle de Requiem, qui avait été demandé par la section des anciens combattants de St Germain.
Cette section, disons-le de suite, qui groupe l’important chiffre de 88 anciens pilus, doit être satisfaite du magnifique succès qu’elle a remportée en ce jour, pour la solennité duquel elle a fait de grands sacrifices.
L’église, brillamment ornée, était comble. On y remarquait, outre les anciens combattants, les membres de la municipalité et du Conseil municipal.
L’office, célébré par M. l’abbé Jay, aumônier du Pensionnat de la Salle, ancien infirmier, fut rehaussé par l’exécution de chants par un chœur composé de 80 dames, jeunes filles et choristes hommes, et par une soliste violoniste, Mlle Odette Ferrand, qui exécuta l’adagio de la sonate « Pathétique » de Beethoven et la « Marche Funèbre » de Chopin.
Le sympathique curé de la paroisse, M. l’abbé Grimoin, prononça le sermon. Avec son cœur d’apôtre et d’ancien combattant, il sut émouvoir l’assistance, en commentant ces paroles de M. Raymond Poincarré, inscrites sur les diplômes des morts : « Honneur aux morts, conseillers des vivants ». Ce fut pour faire un vibrant appel à l’union, à la concorde et à l’amour de la France.
Après l’office eut lieu la bénédiction du drapeau de la section des anciens combattants, précédée de l’exécution, par le cœur mixte, d’un cantique composé spécialement pour la circonstance.
L’assistance s’est ensuite rendue en procession au pied du monument que M. le curé a béni.
Les anciens combattants se sont ensuite réunis en un banquet, à l’hôtel Videt, où l’entrain ne se départit pas un seul instant.
A deux heures et demie, la foule se rassemble à nouveau devant la Mairie et les invités de la municipalité et des anciens combattants arrivent.
Ce sont les musiciens des « Vignerons d’Asnières » qui ont bien voulu venir prêter leur concours et qui, à l’arrivée de M. le général en chef Janin, exécutent « La Marseillaise ».
De l’automobile municipale de la ville de Bourges descend M. Laudier, député-maire, accompagné de Mme Laudier.D ans le groupe des antres personnalités présentes, on remarque MM. Pierre Dubois, Marcel Plaisant, députés ; M. brenet, conseiller général du canton ; M. Gitton, maire de Saint Germain.
Une première cérémonie consiste en la remise du drapeau à la section des anciens combattants, avec son président, M. Lelièvre ; MM. Dumarçay, de la section des Aix ; Ardonceau, de Sainte Solange ; Jossand, du Comité cantonal des Mutilés, etc, et un délégué de la section des anciens combattants alsaciens d’Hagueneau.
Ce dernier, M. Mouilleron, adjudant au 29° bataillon de chesseurs à pied, est porteur du drapeau de sa section. Il se place à gauche de celui de la section des A.C. de Saint Germain que, fièrement, tient un vieux vétéran de 1870, M. Bouchaud, âgé de 80 ans. A droite, se place la drapeau de la section de Bourges de l’U.N.C..
M. le général Janin prononce quelques mots ; « Votre brillante conduite pendant la guerre, dit-il aux anciens poilus, est le plus sûr garant que le drapeau qui vous est remis sera toujours patriotiquement gardé par vous. Je n’ai pas besoin d’en dire davantage ».
La musique joue un morceau, puis M. Mouilleron apporte, en ces termes, le salut des Alsaciens à leurs frères de France : -> Discours de M. Mouilleron
La musique joue un morceau, puis M. Mouilleron apporte, en ces termes, le salut des Alsaciens à leurs frères de France :
On se rend autour du monument, qui se trouve à proximité. Les enfants des écoles, porteurs de bouquets, sont conduits par leur maître, et se placent d’un côté, tandis que de l’autre se groupent les autorités.
Le voile noir qui recouvre le haut de la pyramide est enlevé, une belle couronne offerte par le conseil municipal et une palme de bronze argenté, don des anciens combattants, sont déposées au pied du monument. Les enfants des écoles disent en chœur « l’Ode aux Morts » de Victor Hugo.
M. Gitton, maire, fait lui-même l’appel des morts et les enfants répondent après chaque nom « Mort pour la France ». Il donne lecture de lettres d’excuses de personnalités invitées, notamment une de M. Mauger, sénateur, qui se dit malade ; puis il prononce un discours que personne n’entend.
M. Jossant apporte l’hommage ému des mutilés du canton à leurs frères morts pour la Patrie, et M. Brenet, celui de comité cantonal des pupilles de la Nation.
M. le général Janin, dans une brève allocution, adresse un témoignage de reconnaissance aux anciens soldats de la commune qui sont morts pour la Patrie. Il n’est pas assez de bien les aimer, dit-il , il faut aussi les imiter, pour que leurs souffrances et leur victoire nous laissent une paix véritable et moins dure que celle du passé.
C’est ensuite le tour des parlementaires de prendre la parole.
M. Marcel Plaisant, dans une improvisation vibrante et éloquente évoque la mort glorieuse des poilus de Saint Germain et demande à tous de s’inspirer de la grande pensée de ceux-ci à l’heure grave que nous traversons. Il regrette qu’une si belle victoire ne nous ait pas rapporter davantage.
M. Laudier, s’inclinant devant les morts de Saint Germain, prend texte de leur sacrifice pour demander aux survivants d’œuvrer pour éviter le retour de toute guerre, en prêtant oreilles attentives à toutes les possibilités de paix.
Enfin, M. Mauger, sénateur, arrivé pendant les discours, annonce qu’il a tenu à venir, malgré son état de santé ; il prononce un dernier discours où, s’adressant surtout aux enfants, il leur dit de conserver toujours présent à la mémoire se sacrifice de leurs frères ou de leurs pères et de s’en inspirer pour travailler à la gloire de la France.
La musique joue un morceau, puis a eu lieu un défilé jusqu’à la gare et autour du bourg.
Un vin d’honneur est ensuite offert aux personnages officiels et invités dans une salle de la mairie.
Le soir, un feu d’artifice a été tiré.
En terminant, nous tenons à complimenter les anciens combattants de Saint Germain du Puy de leur belle union et de l’éclat qu’ils ont su donner à leur manifestation patriotique.
Source: Le Journal du Cher du 8 mai 1923. Transcription Monumentsducher1418